Couplage d’échange magnétique oscillant dans des multicouches Cobalt/Silicium déposées à 90 K

Short Period Magnetic Coupling Oscillations in Co/Si Multilayers : Theory versus Experiment N. Yaacoub, C. Meny, O. Bengone, P. Panissod, Phys. Rev. Lett. 97, 257206 (2006)

Depuis la découverte dans les multicouches métalliques, du couplage d’échange indirect entre couches ferromagnétiques au travers d’une couche non magnétique ainsi que de la magnétorésistance géante, de nombreux travaux ont porté sur l’étude de structures artificielles métal ferromagnétique (MF)/isolant (I)/MF ou MF/semi-conducteur (Sc)/MF. C’est ainsi que la magnétorésistance tunnel a été mise en évidence dans des systèmes utilisant une couche isolante comme couche séparatrice. Dans le cas où la couche séparatrice est un semi-conducteur, les résultats sont plus contradictoires d’une expérience à l’autre ainsi qu’entre l’expérience et la théorie. Cela provient du mélange qui se forme à l’interface MF/Sc. En effet, dans ce système, il se forme très facilement des siliciures et / ou des alliages amorphes aux interfaces. Les propriétés magnétiques de ces multicouches sont alors fortement influencées par ce mélange. Ainsi, alors que Enkovaara et al (Phys. Rev. B 2000) ont prédit la présence d’oscillations de couplage à courte période dans des multicouches Cobalt/Silicium, celles-ci n’avaient encore jamais été observées expérimentalement.

Couplage d’échange calculé dans des multicouches Co/Si(n)/Co en fonction de l’épaisseur de silicium (en mRy sur l’échelle de gauche et en erg/cm2 pour pouvoir comparer avec l’expérience sur l’échelle de droite). Les valeurs (positives) négatives correspondent à un couplage (anti) ferrromagnétique des couches de cobalt magnétiques.

Dans le but de limiter la mobilité atomique au moment du dépôt et donc la diffusion atomique aux interfaces Cobalt/Silicium, nous avons élaboré des multicouches Co/Si par pulvérisation cathodique, à basse température (90 K). Dans ce travail, nous avons montré que le dépôt des multicouches Co/Si à 90 K limite le mélange à l’interface à une épaisseur de l’ordre de 5 plans atomiques (contre 25 à 50 plans atomiques lorsqu’elles sont déposées à température ambiante). Cette réduction du mélange aux interfaces a permis de mettre en évidence expérimentalement, et pour la première fois, l’existence d’un couplage d’échange oscillant, entre les couches de Co au travers des couches de Si.

Le panneau supérieur de la figure ci-dessous montre des exemples de cycles d’hystérésis des multicouches Co/Si. On peut remarquer que par la modification de l’épaisseur de silicium d’une fraction de nanomètre, les courbes d’aimantations passent d’un champ à saturation faible à un champ à saturation fort. Cela est décrit en détails sur le panneau inférieur dans lequel l’énergie nécessaire pour saturer l’échantillon oscille en fonction de l’épaisseur de Si avec une période de 0,4 nm. Ce comportement est dû à la modification de la structure électronique du silicium lorsqu’il est confiné, en couches minces, entre deux couches de Co. Ces oscillations sont en accord avec le comportement attendu dans le cas d’un couplage d’échange magnétique oscillant tel que prédit par Enkovaara et confirmé par nos propres calculs. Il est remarquable que ces oscillations soient observées avec la même amplitude à basse température et à température ambiante. Ces résultats ouvrent la porte à de nouveaux développements tant en physique fondamentale que dans le domaine de l’électronique du silicium.

En haut : exemple de courbes d’aimantation de multicouches SitSinm/Co3nm. En bas : énergie nécessaire pour saturer les échantillons des multicouches Co/Si en fonction de l’épaisseur de Si.