Des hétérostructures ferroélectriques contrôlées par la lumière pour l’électronique neuromorphique

22 Mars 2023
Des hétérostructures de van der Waals combinant des couches ferroélectriques et semiconductrices ont été fabriquées puis assemblées dans des dispositifs ferroélectriques (‘FeFET’). L’étude de leurs propriétés optoélectroniques a révélé l’existence de mécanismes subtils d’interaction lumière-structure. La maitrise de ces mécanismes a permis de contrôler l’état de polarisation ferroélectrique par des pulses électriques et des pulses lumineux. Des propriétés de synapse artificielle ont été émulées, caractérisées, puis intégrées dans une simulation de réseau de neurones artificiels.

Une part importante des efforts de recherche en technologies de l’information essaie de contourner le goulot d’étranglement entre processeur et mémoire. Le premier doit travailler de plus en plus vite et manipuler toujours plus de données, alors que la vitesse d’échange avec les composants mémoire est limitée. Ainsi, les processeurs de nos ordinateurs passent une grande partie de leur temps à attendre… Une stratégie de recherche consiste à explorer des technologies « non-Von Neumann », orthogonales à cette architecture classique qui atteint ses limites.

Pour cela, une voie possible est celle des puces neuromorphiques, visant à s’inspirer des réseaux de neurones biologiques. Cette technologie, dite ‘In-memory computing’, permet d’exécuter à la fois des calculs et le stockage mémoire, au sein d’un même composant.

      L’équipe  Nanodevices de l’IPCMS, en collaboration avec le C2N (Saclay), vient de démontrer qu’une telle technologie neuromorphique pouvait être réalisée en combinant des couches ferroélectriques et semiconductrices de van der Waals. Intégrées dans une architecture de photo-transistor, un état de conductivité rémanent (non volatile) a pu être manipulé à la fois par des pulses électriques et optiques.  Les excitations optoélectriques permettent de moduler de façon sélective l’équilibre entre la densité de charges d’interface ferroélectrique/semiconducteur, et le champ interne du ferroélectrique. En retour, la dynamique des domaines ferroélectrique est modifiée, permettant de contrôler l’état de polarisation ferroélectrique, lequel détermine l’état de conduction du FeFET.

      Les chercheurs ont ainsi démontré la plasticité hétéro-synaptique de ces hétérostructures, en faisant fonctionner leur dispositif dans trois modes synaptiques différents : synapse stimulée électriquement, stimulée optiquement et assistée optiquement. Les réseaux de neurones artificiels simulés démontrent un excellent niveau de précision de 91 % proche du modèle idéal des synapses.

      Ces résultats éclairent d’un jour nouveau la compréhension des mécanismes photo-ferroélectriques, laquelle est au cœur des enjeux du domaine. Ils permettent d’avancer vers une étape supplémentaire, l’intégration des systèmes ferroélectrique dans la feuille de route des prochaines architectures informatiques neuromorphiques.

Référence : M. Soliman et al., ACS Appl. Mater. Interfaces, 2013, doi.org/10.1021/acsami.3c00092

Contact : jean-francois.dayen@ipcms.unistra.fr