Étude d’oxydes permettant une totale polarisation en spin à des températures approchant la température ambiante (LSMO : La0.7Sr0.3MnO3, SFMO : Sr2FeMoO6)

L’obtention de taux de magnétorésistance élevés dans des systèmes de type jonction magnétique tunnel est en grande partie conditionnée par l’obtention d’un matériau sous forme de couche mince présentant un caractère demi métallique, c’est à dire une polarisation électronique élevée à température ambiante. Parmi les matériaux présentant une température de Curie supérieure à l’ambiante et un caractère demi métallique, on trouve les oxydes ferromagnétiques Sr2FeMoO6 (SFMO) et le La2/3Sr1/3MnO3 (LSMO) qui sont en cours d’étude au laboratoire. A notre grande surprise les magnétorésistances tunnel observées sont faibles dans l’ensemble des jonctions magnétiques tunnel contenant un de ces matériaux en tant qu’électrode magnétique.

Dans le cas du SFMO, des jonctions tunnel SFMO/STO/CoFe2 ont été réalisées. Des mesures de microscopie à force atomique (AFM) en mode topographique et en mode conduction ont montré que les interfaces de part et d’autre de la barrière sont planes et que la barrière est électriquement homogène, c’est-à-dire sans points chauds. Cependant, des observations par microscopie en mode « pertes d’énergie » (EELS) ont indiqué des fluctuations de la concentration du Fe à l’interface SFMO/STO. Ces observations ont été appuyées par des mesures de XMCD qui ont montré que le magnétisme en surface est beaucoup plus faible que la valeur obtenue pour la totalité de la couche. Le signal magnétique en surface est inférieur à 1 µB/f.u. alors que les mesures SQUID avaient montré des valeurs de 3.4 µB/f.u. Des mesures XPS ont corroboré ces résultats en montrant un déficit de Fe à la surface de SFMO, le rapport Fe/Mo étant de 0.2/1 au lieu de 1/1. Ce manque de Fe en surface peut être dû à une faible pression d’oxygène dans le bâti d’ablation qui favorise à haute température la formation de quelques monocouches de SrMoO4 lorsque le processus de croissance est arrêté. Ceci se traduit par l’apparition d’un gradient de concentration du Fe entre la surface et le cœur de la couche. Une autre hypothèse serait que le Fe du SFMO se re-évapore dû à une température d’évaporation plus faible que la température de dépôt. Cette seconde hypothèse reste à confirmer par des calculs théoriques ou par l’expérience. Quoi qu’il en soit, le passage d’un régime dynamique de croissance à un régime statique juste après la fin du dépôt conduit à des changements au niveau de la surface de l’échantillon qui sont difficiles à maîtriser sans une technique d’analyse chimique in situ en temps réel.

Le manque de Fe aux interfaces SFMO/STO a fait l’objet d’une étude théorique récente. Les calculs ont montré que des interfaces parfaites SFMO/STO présentent un caractère demi-métallique alors que les mêmes interfaces perdent leur polarisation en spin quand elles sont déficientes en Fe, ce qui peut expliquer l’absence de TMR dans nos jonctions.

Les efforts actuels se concentrent sur l’analyse in situ de la stœchiométrie de surface de nos couches. Des problèmes similaires peuvent également apparaître dans le cas du LSMO où les propriétés magnétiques (demi-métallicité, température de Curie) sont également très sensibles à la stœchiométrie. Finalement, il est important de noter qu’une telle électrode demi métallique est aussi particulièrement intéressante pour d’autres projets (comme par exemple le transport dépendant de spin à travers des barrières organiques) où des courants polarisés en spin sont nécessaire.

Il est aussi important de noter qu’une bonne connaissance de la stœchiométrie à la surface des couches est essentielle pour déterminer la composition chimique des derniers plans atomiques d’une couche avoisinant l’interface magnétique / non magnétique. Il a été ainsi montré que dans les cas des barrières de SrTiO3, selon que le dernier plan atomique est SrO ou TiO2, la polarisation électronique à l’interface avec SrTiO3 peut être très différente. Ceci a récemment été mis en évidence dans des jonctions CoFe2/STO/CoFe2/NiFe obtenues par ablation laser.

Figure_DCMI_Equipe Oxydes en couches minces_article Half metallic oxides allowing a total spin polarization at room temperature

Figure 1 : Image TEM d’une jonction magnétique tunnel CoFe2/STO/CoFe2/NiFe (haut). Courbes d’aimantation et de magnétorésistance de cette jonction. Le faible taux de magnétorésistance est dû au mauvais contrôle des plans atomiques (SrO ou TiO2) de la barrière en contact avec les électrodes magnétiques.

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Microscopie et structuration non-linéaires des matériaux organiques

Nous étudions les propriétés dynamiques des électrons et des spins dans les métaux et les systèmes moléculaires. Nous sommes particulièrement intéressés à la dynamique des phases corrélées de spins (ferromagnétisme ou ferrimagnétisme).